Fethullah Gülen et son mouvement

Le « printemps arabe » et ses multiples rebondissements (dont nous ne connaissons pas à cette heure l’ensemble des conséquences) a parfois été analysé par les commentateurs en vis-à-vis de la situation très différente que connaît cet autre important pays à forte majorité musulmane et présent également dans le pourtour méditerranéen à savoir la Turquie. Comparativement à la situation des pays en proie à des révoltes populaires, la Turquie impressionne par sa stabilité et fut présentée comme représentant un modèle de réussite. Donc comme modèle à suivre. Deux éléments sont fréquemment mis en avant pour éclairer son caractère exemplaire : d’une part une transition politique qui semble avoir permis au fil des ans de passer d’une situation dictatoriale et répressive à une démocratie qui autorise une alternance avec la participation aux affaires de l’Etat de courants islamistes modérés, d’autre part une réussite économique à faire pâlir d’envie tous ses voisins et dont on annonce quelle pourrait encore perdurer pendant environ une décennie. Mais la Turquie ne serait-elle pas en mesure d’offrir également sur le plan religieux une alternative aux quêtes de sens et de réformes islamiques qui sont si répandues à travers le monde aujourd’hui ? Le « mouvement Hizmet » - souvent appelé aussi « mouvement Gülen » en référence à son fondateur - que nous nous proposons de présenter brièvement ici se pense en tout cas comme représentant une telle alternative, dans une symbiose qui veut allier fidélité à la tradition islamique et ouverture à la modernité. Ce mouvement aux ramifications de plus en plus mondiales développe une perspective dynamique et originale notamment en matière d’éducation. L’inspiration du mouvement s’inscrit à l’origine dans un ancrage profond dans les réalités propres au paysage social, religieux et politique turc - dont le fondateur, Fethullah Gülen, est un pur produit - et il semble avoir réussi à s’implanter aujourd’hui dans probablement plus d’une centaine de pays. Le « mouvement Gülen » fait l’objet dorénavant d’analyses opposées : pieuvre qui étend lentement mais sûrement ses tentacules selon une stratégie de dissimulation de sa véritable nature (islamiste) pour les uns, arbre plein de vie, de générosité et de fécondité qui change positivement la vie de dizaines de milliers de personnes dans le monde pour les autres. A travers la présentation de la vie du fondateur et du développement progressif de son mouvement nous chercherons à dégager quelques logiques à l’œuvre dans cet étonnant mouvement de renouveau musulman contemporain.

L’islam en Turquie au XXe siècle : d’une mise sous tutelle de la religion au personnage de Saïd Nursi

Envisager de parler de Fethullah Gülen et de son mouvement oblige à parler en premier lieu du statut de l’islam dans la Turquie du XXe siècle. Sans reprendre le détail des relations entre l’Etat moderne fondé en 1923 par Mustafa Kemal Atatürk et la religion musulmane, il convient au minimum d’affirmer que le statut « républicain et laïc » mis en place en remplacement de l’ancien empire ottoman a placé la religion dans une mise sous surveillance de la part de l’Etat, ce qui n’a pu se faire d’ailleurs qu’avec l’exclusion ou l’interdiction de divers courants et confréries jugés récalcitrants. On trouve ainsi un islam « officiel » [1], soutenu par les deniers publics et organisé par l’Etat dans le cadre d’une Direction des Affaires Religieuses, le Diyanet, avec un personnel prolifique [2] d’une part, et une diversité de courants [3] aux sensibilités variées, des confréries autrefois clairement interdites jusqu’aux mouvements islamistes d’autre part. Selon l’avis général, Fethullah Gülen se situe du second côté et plus précisément dans la lignée d’une personnalité religieuse charismatique et originale : Saïd Nursi (1873-1960).

Saïd Nursi (1873-1960) et le mouvement nurdju

Saïd Nursi semble avoir été une personnalité brillante par sa connaissance des sciences religieuses islamiques, au point d’ailleurs que ses disciples le qualifient de l’appellation prestigieuse de Beddiüzzaman, « la merveille de son temps » ! Durant sa longue vie, Saïd Nursi connut alternativement des périodes de relatifs succès et d’exil, avec même des temps d’emprisonnement. Initialement engagé dans le domaine politique en faveur d’un Etat inspiré des préceptes de la shâri‘a, il connut une longue disgrâce sous le régime laïc de la Turquie kémaliste, ce qui le poussa à écrire des œuvres nombreuses regroupées sous le titre de Risale-i Nur (les Epîtres de Lumière). Ces textes [4], diffusés d’abord clandestinement dans le réseau de ses disciples et largement répandus [5] et commentés aujourd’hui, sont composés dans un style fait d’un mélange de citations et de commentaires coraniques, d’une écriture dense où l’éloquence poétique n’est pas absente et où le ton spirituel parfois hermétique rend propice les nombreux commentaires aux teneurs plus ou moins ésotériques, dont le ton peut d’ailleurs beaucoup évoluer selon les urgences du temps. Ce type de littérature, assez courant dans les milieux confrériques, a pourtant chez Saïd Nursi une tonalité propre : pour lui, « le plus important et le plus récurrent thème de ses analyses est la sauvegarde de la foi. Le monde occidental, par sa supériorité technique et politique, bouleverse le monde musulman dont la Turquie fait partie. Cette perte d’équilibre provoque la frustration des musulmans qui, imitant l’Occident pour le rattraper, finissent par perdre la foi. Pour contrer cette perte il propose d’allier l’islam à la science et au progrès. » [6] Une ligne de pensée, liée à une attention à l’éducation [7], que l’on retrouvera de manière omniprésente dans la pensée de F. Gülen.

De son vivant, Nursi a eu des dizaines, voire des centaines, de milliers de disciples. Ceux-ci, organisés selon une organisation pyramidale à quatre niveaux, correspondants à des degrés d’initiation et de responsabilités distinctes, ne peuvent toutefois pas être considérés à strictement parler comme formant une confrérie (tarikat en turc), mais doivent plutôt être envisagés selon la sociologie des groupes (cemaat), courants ou mouvements aux contours plus flous qui constituent une part de l’islam turc non-officiel contemporain [8]. Quoi qu’il en soit, le modèle d’organisation nurdju [9] ainsi que le public (enseignants, professeurs, entrepreneurs) touché par ce courant ne sont pas sans rappeler ce que nous verrons plus loin du mouvement Gülen.

Fethullah Gülen : formation, parcours et relecture

Présenter la vie de Fethullah Gülen demande un réel travail de critique des sources d’informations. En effet, l’essentiel des renseignements disponibles sur sa trajectoire humaine, spirituelle et intellectuelle proviennent d’écrits – nombreux ! – diffusés par ses disciples et dont le ton hagiographique et « lisse » est évident. En voici un exemple :

« Fethullah Gülen passa son enfance dans cette région où les valeurs conservatrices étaient partagées et reproduites, dans une atmosphère plutôt fermée d’ordres derviches et de madrasas (écoles religieuses). Mais il avait une curiosité et un amour insatiables pour la connaissance. Il était donc impossible que cet environnement limité satisfît tous ses désirs et ses intérêts. C’est pour cette raison que déjà très jeune il dirigea son esprit et son attention vers les évènements culturels, politiques et sociaux du monde extérieur. D’après ses propres paroles, il commença à se concentrer sur les problèmes sociaux dès ses premières années à la madrasa. Lorsque son jeune esprit commença à grandir, il découvrit l’art, la littérature, le cinéma, le théâtre et les activités intellectuelles de sa région. Il termina rapidement son éducation à la madrasa, mais il n’eût jamais l’occasion de recevoir une éducation dans les établissements officiels. » [10]

Le même auteur écrit également :

« dès l’âge de quinze ans, Gülen était déjà entièrement plongé dans l’épaisse atmosphère de (ces) idées. Ainsi il était très tôt un jeune homme avec un niveau élevé de maturité intellectuelle. Son environnement familial et le cercle conservateur de la madrasa où il a grandi ont tous les deux contribué à cette maturité précoce. Il avait déjà en lui une expérience spirituelle, et sa tête était remplie d’enthousiasme et d’un esprit d’activisme. » [11]

Milieu d’origine

Né vers 1940 [12], Gülen est issu d’une famille, et plus largement d’une région, conservatrice et dont la proximité géographique avec la frontière de l’Union Soviétique a développé chez lui un attachement fort à ce qui distinguait sa région des voisins, à savoir une conscience vive de l’identité et de la culture turques, ainsi qu’un enracinement revendiqué dans la foi et la communauté musulmanes. En plus de son caractère avéré, cet enracinement géographique recouvre une portée symbolique, puisque Gülen peut se présenter comme l’héritier tout désigné des mystiques musulmans qui vécurent dans cette région et qui participèrent en leur temps (Xe-XIe siècle) à l’islamisation et à la turcisation de ce qui est aujourd’hui la Turquie. Une région dont est également originaire Saïd Nursi, ce qui contribue également à faire de Fethullah Gülen son successeur « naturel ».

« L’idéalisation de son milieu familial et de sa province natale est une constante chez Fethullah Gülen. Les « bonnes » vertus – dévotion, courage, patriotisme et sens du sacrifice pour le pays – leur sont attribuées à volonté. » [13] Plus largement, la nostalgie d’une période passée et bénie revient en toile de fond de la pensée de Gülen. Cet âge d’or souvent évoqué est en fait double. Il se réfère d’une part à une vision « traditionnelle » (en opposition à la modernité) de l’homme et de la société et d’autre part à une référence, classique pour un auteur musulman, à la personne de Muhammed et de ses premiers compagnons. De manière touchante, un biographe de Hocaefendi [14] décrit l’ « homme traditionnel » comme « un modèle public. Même si ce n’était pas toujours le cas en pratique, en théorie il ne vivait pas seulement pour lui-même. Il était plein d’abnégation quand il s’agissait de la société, de la nation, de la religion et de l’humanité. Il n’agissait pas pour son intérêt et son bénéfice personnels. Il aidait et soutenait son prochain, lui faisant part de sa conviction religieuse. Il n’était pas indifférent envers les pauvres, ses voisins ou les gens dans le besoin. Il voyait même les problèmes humains et moraux sévissant à l’autre bout de la planète et en condamnait les responsables. Mais l’idéologie de la modernisation n’avait pas de valeur pour inclure un tel modèle d’homme - décent, accueillant et doux. Elle est matérialiste, et son modèle pour l’homme n’était pas « l’homme » mais « l’individu ». Il vivait dans son coin, seul dans un monde d’égoïsme. » [15] Cette description de l’homme traditionnel recouvre des traits qui sont constamment utilisés par ses partisans pour présenter le personnage Gülen lui-même ! Mais comment ne pas lire également en filigrane de cette description l’épreuve du « choc » culturel vécu par la société turque – et de tant d’autres ! - du fait de la modernisation, puis de la mondialisation, phénomènes qui apparaissent souvent comme une « occidentalisation » du monde [16].

Formation

D’une famille conservatrice où le père exerçait la fonction d’imam, la première formation de Gülen se fit dans le cadre de l’enseignement religieux dispensé par une madrasa non-reconnue. Si les biographes officiels parlent d’un élève brillant, Balci met en cause cette version et affirme qu’« il n’aime pas l’école et cesse de la fréquenter avant la fin du primaire » [17]! Ce serait donc surtout par fidélité aux vertus familiales qu’il finira sa formation, ce qui lui permettra d’être embauché [18] comme prédicateur (vaiz) avec statut de fonctionnaire par les services officiels de la Diyanet. Adolescent, il se met à fréquenter les cercles nurdju ce qui influencera manifestement sa pensée en matière d’éducation et lui fera sûrement prendre conscience de la nécessité de ne pas rejeter en bloc les influences occidentales.

Toutefois, l’ouverture aux idées occidentales (philosophie, sociologie, sciences) ne vient chez lui que dans un deuxième temps et probablement dans une démarche d’autodidacte [19]. De sa synthèse entre sa formation initiale et l’intégration des questionnements [20] venus d’ailleurs germeront ses idées propres, ce qu’il aura l’occasion de tester et de diffuser durant les années où il exerça sa fonction officielle.

Tout laisse à penser que l’itinérance occasionnée par sa recherche de travail, puis par son exercice même, alla de pair avec sa découverte progressive de l’impact de l’occidentalisation et des remises en cause de la foi islamique comme de l’éthique et des valeurs religieuses musulmanes. C’est donc semble-t-il plus par souci d’apologétique que par goût que Gülen commença à se confronter aux positions occidentales. Ceci ne sera pas sans marquer sa conception du dialogue, un concept dont il est souvent question chez lui.

Le succès

En 1966, Fethullah Gülen est affecté à la mosquée Kestamepazari à Izmir. C’est en ce lieu et en cette ville qu’il connaîtra un succès croissant : on y vient de plus en plus nombreux pour écouter ses prêches. Sa maîtrise du verbe, son utilisation d’une langue riche, la qualité de sa rhétorique, sa capacité à créer dans son auditoire différentes émotions, l’enrichissement de son propos par des exemples et une remarquable maîtrise de lui-même séduisent son public. Fethullah Gülen est incontestablement un grand prédicateur et sa notoriété actuelle trouve dans ce charisme son origine [21].

Brièvement emprisonné pour activités religieuses illicites en 1970, Gülen poursuivit sa carrière d’imam et de prédicateur en Turquie et de plus en plus sur la scène internationale jusqu’en 1999, date où il partit vivre aux Etats-Unis dans le double but d’échapper à d’éventuelles accusations de personnes inquiètes de sa montée en puissance sur le plan national – un procès lui fut d’ailleurs intenté pour atteinte à la sécurité de l’Etat et jusqu’à nos jours ses adversaires le soupçonnent d’avoir un agenda politique caché qui correspondrait à une prise du pouvoir en Turquie avec imposition de normes plus islamiques, en distance avec les normes kémalistes et laïques – et pour y recevoir des soins (diabète et maladies cardio-vasculaires, Gülen fut opéré du cœur en 2004 [22]). Il vit actuellement en Pennsylvanie en situation de semi-retraite, entouré de quelques fidèles. Gülen ne s’est jamais marié, ce qui peut être étonnant pour un leader musulman, mais qui dans son cas peut aussi être une manière de « prêcher par l’exemple », dans la mesure où il peut être compris comme totalement donné à ses disciples et à son « mouvement » avec lequel il cherche volontairement à ne faire qu’un.

Le « mouvement Gülen » : des écoles aux media

A partir de 1968, Fethullah Gülen organise avec d’autres personnes des camps d’été, mi-colonie de vacances, mi camp scout, où il prend à cœur d’apporter une formation islamique aux jeunes rencontrés, ce qu’il voit comme un nécessaire complément à la formation qu’ils reçoivent dans le cadre de l’école laïque. Il prend soin d’intégrer à son enseignement les données scientifiques ou philosophiques dispensées par ailleurs. Le succès de cette initiative va être la cause directe de sa fin [23], mais de cette expérience sortit une génération de proches qui s’investiront par la suite dans la diffusion des idées de Gülen. Se mettent ainsi en place des groupes de disciples selon un principe hérité du mouvement nurdju. Mais Gülen trouve aussi les moyens de ses ambitions dans le soutien que lui apporte une frange dynamique de la population et sensible à ses positions : commerçants, entrepreneurs, étudiants et jeunes intellectuels. Les uns vont financer ce que les autres vont peu à peu proposer et structurer, à savoir un dispositif de soutien éducatif qui aura pour objectif de promouvoir une nouvelle génération, inspirée des idées de Gülen. Des « maisons de la lumière » voient le jour, c'est-à-dire des appartements regroupant à chaque fois une petite dizaine d’étudiants en leur permettant pour un prix modique de se mettre dans les meilleures conditions pour réussir leurs études. L’accès à ces lieux se fait sur la base des capacités aux études et par une sorte de cooptation par le mouvement. Une fois admis en son sein, la diffusion des principes propres au mouvement se fera par la possibilité de découvrir les écrits des fondateurs (ceux de Gülen, mais aussi les écrits de Nursi), mais globalement l’argument majeur employé est celui de l’exemplarité… et moins ouvertement la reconnaissance d’une dette morale envers le mouvement qui permet à des étudiants capables, mais d’origines parfois très modestes, de parvenir à leurs fins. Dans les années 1970, cette formation chercha notamment à promouvoir une alternative musulmane et croyante face aux tentations athées ou gauchisantes de la jeunesse turque.

Le réseau des écoles

Une nouvelle étape fut franchie à partir du moment où les disciples de Gülen, dont le nombre et l’influence grandissaient, purent investir plus directement dans le domaine éducatif par la mise en place d’écoles inspirées par les idées du Maître. Les deux premières écoles ouvrirent en 1982, l’une à Izmir, l’autre à Istanbul [24]. Cette dynamique se développa à partir de la décennie 1980-90, en partie suite au coup d’Etat militaire de 1980 dont les généraux furent moins critiques envers certains courants religieux que ne le furent leurs prédécesseurs. Ce modèle se développa évidemment en Turquie, mais s’étendit dans les années qui suivirent la chute du mur de Berlin dans toute l’Asie Centrale et vers d’autres horizons encore par la suite. On compte aujourd’hui plus d’un millier [25] de ces écoles inspirées [26] par la pédagogie Gülen, dans une centaine de pays et sur tous les continents. Quelquefois appelées « écoles turques », le réseau de ces écoles mis en place par les disciples de Gülen s’appuie largement sur la communauté turque déjà présente dans les pays où elle s’installe. C’est le cas par exemple en Europe occidentale ou aux Etats-Unis. Dans les anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale l’expansion des écoles dans les années 1990 fut explicitement vécue comme une manière de renouer avec des peuples de cultures proches et aux origines lointaines communes. Dans une étude consacrée à ce sujet [27], Bayram Balci montre bien les facteurs qui ont facilité la diffusion du système Gülen : un enseignement de qualité, un équipement moderne, une volonté de privilégier les matières scientifiques et l’informatique, un corps professoral en partie originaire de Turquie et totalement dévoué à la cause des établissements où ils travaillent, un suivi régulier et précis des élèves. La volonté clairement affichée est de promouvoir une culture de l’excellence et de proposer un comportement modèle. Concrètement cette dynamique s’exprime par une stratégie de communication bien huilée où sont mis en avant les succès aux examens remportés par les élèves, dont les meilleurs participent à un concours international appelé « Olympiades ». Ordre, propreté, résultats et matériel neuf sont systématiquement montrés pour convaincre de la pertinence de ces établissements et en assoir une image impeccable [28]. L’insistance mise sur l’apprentissage de l’anglais en est un autre signe distinctif[29]. Ainsi d’étapes en étapes, le réseau s’étend passant de degrés en degrés, de collèges en lycées, puis quelquefois aboutissant à l’ouverture d’une université. Le soutien financier suscité par le dynamisme économique des entrepreneurs turcs à la recherche de nouveaux marchés trouve dans ces écoles des partenaires tout désignés dans la mesure où ils permettent à la fois de faire cause commune dans des régions où les preuves de la crédibilité du « label turc » restent à faire et parce qu’ils trouvent dans les étudiants issus de ces écoles un public compétent et susceptible de participer à la bonne marche des affaires commerciales. Il est juste ici de parler de fonctionnement en réseau : hommes, informations, compétences, initiatives et financements interagissent [30]. Toutefois à terme, l’organisation espère « faire école » localement de sorte que si le financement initial dépend fortement de l’extérieur, à terme ce sont les frais de scolarité perçus sur place qui doivent assurer la pérennité du fonctionnement des établissements.

Financement et cemaat

La croissance exponentielle du nombre d’écoles du mouvement Gülen, opérée de surcroît sur un temps très court, ne peut que susciter des questions sur leur mode de financement. S’intéresser au financement s’avère d’ailleurs instructif sur le fonctionnement et l’organisation du mouvement lui-même. La force du mouvement tient à son inscription sur un large spectre de la société turque avec à la base une multitude de petits groupes (cemaat) de rencontres regroupant environ une dizaine de personnes à chaque fois, en fonction de critères d’affinités : voisins directs ou habitants d’un même quartier, personnes de même classe sociale, de même métier (entrepreneurs, médecins, ingénieurs, etc.) ou ayant une formation commune, enfin regroupés selon des intérêts communs ce qui rejoint souvent les catégories précédentes. La régularité des rencontres est en général hebdomadaire. Selon Helen R. Ebaugh, qui a étudié le fonctionnement de ces groupes, « dans ces petites réunions, les participants parlent d’une variété de choses, telles que religion, travail technique, famille et tout aspect de la vie évoqué par les membres. Quelquefois le groupe lit un passage du Coran ou de la tradition prophétique; en d’autres occasions le groupe peut accueillir un intervenant. Plus fréquemment, les membres d’un groupe donné se retrouvent tout simplement pour échanger au sujet de leurs vies, de ce qui a pu être important au courant de la semaine. » [31] Comme évoqué plus haut, l’étude de textes de Nursi ou de textes, cassettes audio ou vidéo de Gülen trouvent aussi place dans ce cadre. Il est courant que les groupes se constituent selon une distinction masculin/féminin, c'est-à-dire selon une non-mixité, élément surprenant pour une mentalité occidentale, mais bien en accord avec les valeurs des couches conservatrices de la société turque. En somme, loin d’être des groupes organisés sur le seul critère spirituel, ces cemaat trouvent leur force et leur raison d’être dans la diversité des registres abordés et dans la convivialité qui s’y exprime. On comprendra aisément que ce même modèle puisse fonctionner dans les communautés de la diaspora turque d’Europe occidentale ou des Etats-Unis, le double côté religieux et culturel-linguistique permettant au sein de ces groupes d’entretenir une référence vivante à l’« identité » héritée – ou recomposée - du pays d’origine.

Le réseau de confiance établi grâce à la multitude de petits groupes a aussi pour effet de stimuler la générosité de ses membres et c’est bien au niveau de ces cemaat que nous situons la principale source de recettes du mouvement. Pourquoi donner de l’argent ? Quatre raisons nous semblent pousser à la générosité : en premier lieu, la remise de la zakât trouve ici un lieu d’expression qui est largement compétitif avec les organismes plus dépendants de l’Etat et dont l’impression d’impersonnalité domine et nuit à la crédibilité, deuxièmement une culture du don est largement cultivée par l’islam et la générosité fait partie de ses vertus fondamentales, ce qui peut s’exprimer de plusieurs manières (sadaka, kurban, vakif, bereket [32]) en plus de la zakât déjà citée et qui correspond à une obligation. Cette générosité estimée et recommandée s’articule bien avec ce qu’en dit la culture turque elle-même. Enfin, l’« efficacité » des projets financés par le mouvement – qui est relayée par une bonne stratégie de communication – permet de « voir le résultat » obtenu par ces financements : écoles, activités, revues, journaux, ONG [33], etc. Les petites rivières finissant par former de grands fleuves, le mouvement génère des sommes colossales [34] et il est possible de parler aujourd’hui de véritable empire financier.

Nouveaux développements du mouvement et carrière internationale de Fethullah Gülen

Après plus d’une vingtaine d’années où il exerça un rôle officiel de prédicateur, Gülen démissionna de son poste en 1981. Cela lui donna une marge de manœuvre plus grande, ce qu’il mit à profit pour faire de nombreux voyages pour rencontrer ses adeptes en Turquie tout d’abord, puis de plus en plus sur la scène internationale.

Sur la scène turque, l’influence de Gülen donna lieu comme nous l’avons déjà mentionné à l’émergence d’un réseau d’écoles, ainsi qu’à des cercles de proximité et de rencontre autour de ses idées, mais c’est aussi sur une gamme plus large que se développa son mouvement en misant par exemple sur une forte stratégie de communication. Ainsi fut fondé le journal Zaman [35] en 1986 dans le but de fournir et de traiter l’information, de diffuser une réflexion qui soit dans la ligne de la pensée de Gülen, mais offrant aussi à ce dernier alternativement un lieu d’expression et de défense en raison des nombreuses attaques dont il est l’objet de la part de ceux qui estiment dans son pays qu’il est l’agent d’un islamisme qui ne dit pas clairement son nom ou qu’il est en fait une personnalité aux fortes ambitions politiques. Zaman fait partie aujourd’hui des journaux aux plus gros tirages en Turquie A cette édition en langue turque s’est rajoutée une édition en anglais (Today’s Zaman [36]) ainsi que des éditions souvent bilingues dans plusieurs pays ayant une forte communauté turque [37]. Le mouvement Gülen a également lancé une chaîne de télévision depuis 1993, appelée Samanyolu, qui tout comme le journal Zaman sont gérés de manière très professionnelle et sont aujourd’hui rentables financièrement. En 1994, est crée la Fondation pour les Journalistes et les Ecrivains dans le but d’offrir une table de dialogue et d’échange de vue à un ensemble d’intellectuels – que le mouvement aime présenter comme recouvrant une palette très large des opinions en vigueur en Turquie – afin de créer des ponts entre eux et éviter les enfermements dans des comportements idéologiques hermétiques. Cette Fondation s’occupe de publications, de l’organisation de Conférences et de Colloques et travaille en partenariat avec des « Plateformes de dialogue » [38] interculturel ou interreligieux que le mouvement tend à mettre en place dans un certain nombre de pays, ce qui lui permet d’avoir une ouverture sur le monde universitaire voire intellectuel dans un sens plus large (chercheurs, politiques, journalistes).

Le rayonnement international de son mouvement et les voyages qu’il effectue à l’étranger vont mettre Fethullah Gülen au contact d’autres personnalités du monde culturel et religieux, surtout à partir de la fin des années 90. Il rencontre le Pape Jean-Paul II au Vatican en 1998, puis d’autres leaders religieux (rabbins, responsables chrétiens, etc.) et participe directement ou indirectement à quelques Conférences internationales sur le dialogue interreligieux. Ce thème du dialogue interreligieux au niveau mondial prend de l’importance chez lui et il publie des articles à ce sujet [39]. Résidant aux Etats-Unis depuis 1999, il réagit très vite aux attentats du 11 septembre 2001 en faisant publier dès le lendemain dans le journal Washington Post une condamnation de ces attaques [40]. L’effet de terreur qui suivit cet évènement ne pouvait qu’aller en contre-sens des idées prônées par Gülen. Toutefois il réussit habilement à se faire admettre dans ce cadre troublé comme un représentant d’une autre manière d’être musulman, selon une tendance qui a été catégorisée depuis aux Etats-Unis sous le terme de « moderate islam ». De sorte que s’il n’eut jamais une attitude anti-américaine, il peut être présenté aujourd’hui comme un allié assez objectif des institutions américaines [41].

Conclusion

Sous des airs de grande simplicité et de modestie, image savamment distillé par ses services de communication, Fethullah Gülen est aujourd’hui un homme dont l’influence est impressionnante si bien que nous avons pu parler à l’une ou l’autre reprise d’un véritable empire édifié patiemment au long des ans. Ce mot empire nous semble approprié si on l’utilise dans le sens de son rayonnement spirituel et moral, des enjeux financiers (il ne nous paraît pas incompatible de parler d’empire financier et de leader ne cherchant pas la richesse !), voire de son influence intellectuelle (diffusion de ses idées). Toutefois, pour notre part, l’ambition politique au sens politicien et visant une prise directe du pouvoir (en Turquie) ne nous semble pas correspondre à l’homme Gülen. Ni son âge, ni son état de santé ne peuvent rendre une telle perspective crédible, même pour ceux qui doutent de ses intentions. Par ailleurs son pouvoir serait-il réellement plus grand s’il devait se lancer en politique ? Cela nous paraît être une erreur d’appréciation.

Par son charisme et son adaptation aux évolutions de son pays, puis du monde, Gülen a su mobiliser une multitude de personnes qui se sont mis à partager tout ou partie de sa vision de l’homme, de l’éducation, du progrès, de l’islam ou encore du nécessaire dialogue. Mieux, il a su les rendre activement participants d’une dynamique de transformation de leur situation sociale. Néanmoins la constante référence à sa personne (d’où d’ailleurs le nom de « mouvement Gülen » qui colle à cet ensemble et dont il voudrait aujourd’hui se démarquer en le faisant plutôt appeler « mouvement des volontaires » ou « mouvement Hizmet ») masque également le vide qui l’entoure et qui augure d’une succession improbable.

Marc Botzung


[1] Xavier Jacob, « L’islam turc : 1. L’islam officiel », Se Comprendre, n° 95/11, novembre 1995, 14 p.
[2] « En 1981, son budget dépassait celui du Ministère de l’Industrie, et n’a cessé d’augmenter depuis lors pour atteindre en 2002 près de 400 millions d’euros. Elle gère actuellement plus de 75000 mosquées, près de 90000 fonctionnaires et 75000 employés. » (Elise Massicard, « L’islam en Turquie, pays « musulman et laïc », in Olivier Roy (dir.), La Turquie aujourd’hui (Un pays européen ?), Encyclopaedia Universalis France, 2004, 193 p., aux pp. 55-67, ici p. 57)
[3] Xavier Jacob, « L’islam turc : 2. L’islam parallèle », Se Comprendre, n° 95/12, décembre 1995, 14 p.
[4] Nous avons pu consulter en français : Bediüzzaman Said Nursî, Traité de la Fraternité, Envar Nesriyat, Istanbul, 2005, 64 p., ainsi que du même auteur Petites Paroles, Envar Nesriyat, Istanbul, 2006, 116 p., et Le Signe Suprême, Envar Nesriyat, Istanbul, 2007, 252 p.
[5] Le courant nurdju a développé de solides infrastructures pour diffuser la pensée du maître : maisons d’édition, instituts, centres d’enseignement, presse. Cf. Paul Dumont, « Les « disciples de la lumière ». Le mouvement nourdjou en Turquie », in Olivier Carré et Paul Dumont (dir.), Radicalismes islamiques (tome 1 : Iran, Liban, Turquie), L’Harmattan, 1985, 256 p., aux pp. 215-256, voir ici p. 242.
[6] Bayram Balci, Missionnaires de l’islam en Asie centrale (Les écoles turques de Fethullah Gülen), Institut Français d’Etudes Anatoliennes / Maisonneuve & Larose, 2003, 301 p., ici p. 92.
[7] Dans la première partie de sa vie l’un des projets de Saïd Nursi était de « sauver les mektep de l’irréligiosité et les madrasa de l’obscurantisme et de l’intolérance. » (Cité par Bayram Balci, op. cit., p. 88) Mektep désignait alors les écoles fonctionnant à l’occidentale et madrasa les écoles d’enseignement coranique.
[8] Elise Massicard, « L’islam en Turquie, pays « musulman et laïc », in O. Roy, op. cit., pp. 60-61.
[9] Ce terme turc est construit à partir du nom du fondateur (Nursi).
[10] M. Enes Ergene, Le nouveau visage de l’islam: le mouvement Gülen, 2e édition, Editions du Nil, 2009, 79 p., pp. 29-30.
[11] Ibidem, p. 34.
[12] Bayram Balci indique une naissance en 1938 dans le village de Korucuk, alors que les biographes officiels situent sa naissance dans la capitale régionale Erzurum, en 1938 selon Enes Ergene (op. cit., p. 29), en 1941 selon M. Fethullah Gülen, Essais, perspectives et opinions, The Light, 2005, 160 p., voir p. 3. Cette dernière date est présentée sur les sites officiels.
[13] Bayram Balci, op. cit., p. 99.
[14] Littéralement « le maître respecté », titre attribué à des personnalités religieuses estimées pour la qualité de leur enseignement. Ce titre est attribué à Fethullah Gülen par ses disciples.
[15] M. Enes Ergene, Le nouveau visage de l’islam: le mouvement Gülen, p. 22.
[16] Cf. Jean-Claude Guillebaud, Le commencement d’un monde (Vers une modernité métisse), Seuil, 2008, 391 p. Parmi les facteurs déstabilisants généralement constatés on citera : forte croissance démographique, apparition de nouveaux modèles économiques et culturels, familiaux et sociaux, scolarisation, exode rural, chômage, déracinement et urbanisation.
[17] Bayram Balci, op. cit., p. 99.
[18] A quelle date ? M. Enes Ergene parle de 1959 (op. cit., p 37), alors que Balci indique que ce serait dès 1953, « dès l’âge de 15-16 ans » (op. cit., p. 103). Il peut s’agir de statuts différents obtenus à ces dates.
[19] Cf. par exemple Helen Rose Ebaugh, The Gülen Movement (A Sociological Analysis of a Civic Movement Rooted in Moderate Islam), Springer, 2010, 134 p., à la p. 25.
[20] On pourra consulter à ce sujet B. Jill Carroll, A dialogue of Civilizations (Gülen’s Islamic Ideals and Humanistic Discourse), Tughra Books & The Gülen Institute, 2010, 114 p.
[21] Sur les talents d’orateur de Gülen et sa stratégie de séduction, voir Bayram Balci, op. cit., pp. 133-141.
[22] Cf. La plaquette Fethullah Gülen and the Hizmet Movement, International Dialogue Platform & Katholieke Universiteit Leuven, 2011, 24 p., ici p. 6.
[23] Cette initiative trop autonome est jugée incompatible avec ce qui est attendu d’un fonctionnaire de l’Etat.
[24] Helen Rose Ebaugh, op. cit., p. 29.
[25] Ebaugh parle de plus de 1000 écoles dans 100 pays (The Gülen Movement, p. V), tandis que pour Guillaume Perrier elles seraient plus de 2000 réparties sur 110 pays selon ce qu’il écrit dans un article où il parle de la première école liée au mouvement Gülen, le Collège « Educactive » ouvert à Villeneuve Saint Georges en région parisienne (cf. « Les éclaireurs de l’Islam », in Le Monde, du 30 décembre 2009). Voir aussi au sujet de ce Collège : https://youtube.com/embed/3mLc7ZflNkI.
[26] La source d’inspiration et le maître à penser de ce réseau éducatif est Fethullah Gülen, pour autant ces écoles ne lui « appartiennent » pas, c'est-à-dire qu’il n’en est pas le propriétaire. En fin de document nous reviendrons sur certains traits caractéristiques de la pensée de Gülen en matière d’éducation.
[27] Bayram Balci, Missionnaires de l’islam en Asie centrale (Les écoles turques de Fethullah Gülen), Institut Français d’Etudes Anatoliennes / Maisonneuve & Larose, 2003, 301 p. Ce livre nous semble être jusqu’à présent le livre le plus complet sur Gülen et son mouvement qui soit paru en français, mais du fait de sa date de parution il ne couvre pas la décennie 2000. C’est probablement chez cet auteur que les journalistes français puisent l’expression qui compare les disciples de Gülen investis dans l’éducation aux « jésuites de l’islam ».
[28] Pour en revenir à un exemple en Turquie, voir par exemple le site web du Fetih College d’Istanbul : www.fetihkoleji.k12.tr , ainsi que la brochure éditée par cet établissement : General Philosophy of Education at Fetih College, Istanbul, 61 p., s.d.
[29] Bayram Balci, op.cit., pp. 172-175.
[30] Thomas Michel, jésuite américain ayant publié plusieurs articles sur Gülen et son mouvement, présente ainsi le réseau d’écoles inspirées par Gülen : « Agissant de manière indépendante, mais en conservant des relations de coordination et de formation, les écoles pourraient être qualifiées de large fédération d’institutions qui partagent une vision pédagogique commune, un programme d’études identique et des ressources humaines et matérielles. » (cf. http://www.thomasmichel.us/gulen-educator.html, article « Fethullah Gulen as Educator », voir fin du premier paragraphe ou encore le même article, daté du 18 février 2003 et légèrement abrégé dans Journalists and writers foundation, Understanding Fethullah Gülen, Istanbul, s.d., 103 p., ici p. 21)
[31] Helen Rose Ebaugh, The Gülen Movement (A Sociological Analysis of a Civic Movement Rooted in Moderate Islam), Springer, 2010, 134 p., à la p. 49. Traduit par nous.
[32] Nous avons repris ici les termes turcs présentés par H. E. Ebaugh, op. cit., pp. 65-81 dans son chapitre coécrit avec Dr Zachary Baskal et intitulé « The Turkish-Islamic Culture of Giving ». Ces mêmes expressions de générosité existent parfois avec quelques variables en d’autres contextes islamiques.
[33] Une ONG d’aide humanitaire intitulée « Kimse Yok Mu » et liée au mouvement Gülen s’est développée suite au tremblement de terre qui a affecté la région de Marmara (Turquie) en 1999. Cf. Kimse Yok Mu, 2010 Promotional Brochure, 47 p. ou le site web de l’ONG: www.kimseyokmu.org.tr
[34] H. E. Ebaugh, op. cit., donne des exemples de contributions aux pp. 52-61.
[35] Disponible en édition web : http://www.zaman.com.tr/ .
[36] Disponible en version web sur : http://www.todayszaman.com/
[37] Il existe en France Zaman France disponible en version papier et sous forme de journal en ligne : www.zamanfrance.fr
[38] Une telle organisation existe en France et est intitulée : « Plateforme de Paris pour le dialogue interculturel», cf. http://www.plateformedeparis.fr/
[39] Par exemple : Fethullah Gülen, Nécessité du dialogue entre religions (Une perspective musulmane), The Light, Izmir, 2005, 24 p.
[40] Le texte est publié dans Understanding Fethullah Gülen, p. 19. Un autre ouvrage a été publié ultérieurement par Gülen et ses proches sur la question du terrorisme : Ergün Çapan (éd.), Terrorisme et attentats suicides : une perspective islamique, The Light, Izmir, 2005, 146 p.
[41] Le Sénat du Texas a ainsi par exemple approuvé le 25 janvier 2011 une résolution reconnaissant Fethullah Gülen comme un artisan de dialogue et de paix (cf. http://www.todayszaman.com/news-233740-texas-senate-passes-resolution-commending-fethullah-gulen.html).

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