Les Compagnons et la Sounna
Les Compagnons obéissaient au Messager en tout. Ils étaient si imbus d'amour pour lui qu'ils s'évertuaient à l'imiter de toutes les façons possibles. En fait, le Coran lui-même les conduisait à agir ainsi, car il affirme que l'obéissance au Messager est directement liée à la foi:
Non! Par ton Seigneur! Ils ne seront pas croyants aussi longtemps qu'ils ne t'auront demandé de juger de leurs disputes et qu'ils n'auront éprouvé nulle angoisse pour ce que tu auras décidé, et qu'ils se soumettent complètement [à ta sentence]. (4:65)
Voici quelques exemples montrant leur degré de soumission:
Peu avant sa mort, le Messager organisa une armée, nomma Usama à son commandement et lui dit de «n'avancer qu'aussi loin que le lieu où ton père est tombé martyr, et affermis-y notre règne.»[1] Le Messager tomba malade avant le départ de l'armée. Quand Usama le visita, le Messager pria pour lui. L'armée était sur le point de se mettre en route quand le Messager décéda. Abou Bakr, son successeur politique immédiat ainsi que le premier calife, envoya l'armée sans hésiter, malgré des soulèvements dans divers endroits de l'Arabie. Il accompagna les soldats jusqu'à la banlieue de Médine et dit: «Par Dieu, quand bien même les loups nous attaqueraient de toutes parts, je n'abaisserai pas le drapeau hissé par le Messager.»[2]
La mort du Messager choqua et affligea les musulmans de Médine. Les élections qui s'ensuivirent pour choisir le calife causèrent quelque dissension parmi les Compagnons. Abou Bakr se chargea d'une très lourde tâche, car l'armée attendait d'être envoyée, des nouvelles de soulèvements leur parvenaient, et de petits groupes n'étaient pas contents de son élection.
Juste à ce moment, Fatima (la fille du Prophète) s'enquit auprès de lui de la part qui lui revenait dans les terres de Fadak. Abou Bakr ne voulait pas l'offenser, mais était aussi déterminé à rester fidèle à la Sounna. Il disait: «Par Dieu, je ne changerai rien de ce que le Messager de Dieu faisait de son vivant.»[3] Il avait entendu quelque chose du Messager que Fatima ne savait pas: «Nous, la communauté des Prophètes, ne laissons rien en héritage. Tout ce que nous laissons est pour la charité.»[4]
Après la conquête de La Mecque, des gens de toute l'Arabie embrassèrent l'islam. Bien sûr, beaucoup n'étaient pas aussi dévoués à l'islam que l'étaient les Compagnons. Certains apostasièrent et, suivant Musaylima le Menteur, se révoltèrent contre Médine. D'autres montraient des signes de révolte en refusant de payer la zakat (aumône prescrite). Abou Bakr combattit ces gens jusqu'à ce que la paix et la sécurité fussent à nouveau rétablies en Arabie.
'Omar était connu comme «celui qui se soumet à la vérité». Ignorant le décret du Prophète, il avança son propre jugement concernant le montant d'argent à donner en compensation pour quelqu'un à qui l'on avait coupé un doigt. Un Compagnon s'opposa à lui: «Ô Commandant des Fidèles! J'ai entendu le Messager dire: 'Le prix du sang pour les deux mains ensemble est le même que pour celui d'une vie. Ce montant est partagé également pour tous les doigts, à savoir dix chameaux pour chacun'.»[5] Omar retira immédiatement sa décision et se dit: «Ô fils de Khattab! Oses-tu juger, par ton propre raisonnement, une affaire déjà décrétée par le Messager?»
Abou Musa al-Ash'ari rendit visite à Omar à son lieu de travail. Il frappa trois fois à sa porte puis partit, vu que personne ne répondait. Après que Abou Musa était parti, Omar ouvrit la porte et demanda qui avait frappé. Apprenant qu'il s'agissait de Abou Musa, Omar envoya quelqu'un le chercher et lui demanda pourquoi il était parti. Abou Musa répondit: «Le Messager a dit: 'Quand vous visitez quelqu'un, frappez à la porte. Si l'on ne vous autorise pas à entrer après que vous avez frappé pour la troisième fois, partez'.» Omar lui demanda s'il pouvait vérifier ce hadith qu'il ignorait. Abou Musa ramena avec lui Abou Sa'id al-Khudri, qui attesta de sa véracité. Omar concéda.[6]
Quand Omar fut poignardé alors qu'il se prosternait à la mosquée, on lui demanda s'il voulait désigner son successeur. Omar répondit: «Si je désigne, un être (Abou Bakr) qui est meilleur que moi l'a fait. Si je ne désigne pas, un être (le Messager) qui est meilleur que moi ne l'a pas fait.»[7] Omar était sûr de suivre cette dernière action. Toutefois, pour éviter tout éventuel désaccord, il laissa l'affaire à un comité consultatif qu'il forma à cette fin.
Quand Omar vit Zayd ibn Khalid al-Juhani faire une prière surérogatoire après la prière de l'après-midi, il lui reprocha de faire ce que le Messager ne faisait pas. Zayd lui dit: «Même si tu cassais ma tête en morceaux, je n'abandonnerai jamais cette prière de deux rak'a, car j'ai vu le Messager l'accomplir.»[8]
Umm Salama, l'une des épouses du Prophète, rapporta qu'un jour son époux n'avait pas pu faire la prière surérogatoire de deux rak'a à la suite de la prière du midi parce qu'il était retenu par une délégation. Il accomplit donc cette prière après celle de l'après-midi.[9] Zayd a sûrement vu le Messager la faire à ce moment-là.
Une fois, Ali but de l'eau alors qu'il était debout. Maysara ibn Ya'qub le critiqua: «Pourquoi bois-tu debout?» Ali répondit: «Si je fais cela, c'est parce que j'ai vu le Messager agir ainsi. Et si je bois assis, c'est parce que j'ai vu le Messager agir ainsi.[10]
Au lieu de laver les pieds pendant les ablutions, les musulmans peuvent passer la main mouillée sur la surface supérieure de légères bottines d'intérieur à semelles souples (ou chaussures d'intérieur). Montrant la suprématie de la Sounna sur le raisonnement personnel, Ali dit: «Si je n'avais pas vu le Messager passer sa main mouillée sur le dessus de ses bottines d'intérieur, j'aurais jugé plus adéquat d'essuyer ainsi le dessous de telles bottines.»[11]
Si un musulman en tue un autre par erreur, les héritiers du tueur doivent payer le prix du sang. Omar pensait qu'une épouse ne pouvait pas hériter du prix du sang de son défunt mari. Cependant, Dhahhak ibn Abi Sufyan l'informa que quand Ashyam ibn Dibabi avait été tué, le Messager avait donné une partie du prix du sang à son épouse. Omar déclara: «À partir de maintenant, les femmes hériteront du prix du sang de leurs maris.»[12]
Abou Ubayda ibn Jarrah commandaient les armées musulmanes qui se battaient en Syrie. Quand Omar allat le visiter à Amwas, la peste s'était déjà déclarée. Avant que Omar n'entrât dans la ville, Abd ar-Rahman ibn 'Awf lui dit: «J'ai entendu le Messager dire: 'Si vous apprenez que la peste s'est déclarée à un endroit, n'y entrez pas. Si vous vous trouvez déjà en un tel endroit, ne le quittez pas.'»[13] Omar, si obéissant à la Sounna, rentra chez lui sans voir son fidèle ami pour la dernière fois.
[1] Ibn Sa'd, Tabaqat, 2:190
[2] Suyuti, Tarikh al-Khulafa', 74
[3] Bukhari, "Fara'idh," 3
[4] Bukhari, "Khums," 1; Muslim, "Jihad," 52
[5]Ibn Hanbal, 4:403; Hindi, Kanz al-'Ummal, 15:118
[6]Muslim, "Adab," 7:33; Ibn Hanbal, 3:19
[7] Bukhari, "Ahkam," 51
[8] Ibn Hajar, Fath al-Bari', 3:83
[9] Bukhari, "Mawaqit," 33
[10] Ibn Hanbal, 1:134
[11]Abu Dawud, "Tahara," 63
[12]Abu Dawud, "Fara'idh," 18; Tirmidhi, "Fara'idh," 18
[13]Bukhari, "Tib," 30; Ibn Athir, Usd al-Ghaba, 3:48
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